Tempêtes Domingos et Karlotta
Le dimanche 11 février 2024, entre 3h et 9h, le littoral vendéen était en vigilance orange pour les risques de vagues submersion. Cette alerte était basée sur trois éléments : un fort coefficient de 110, une baisse importante de la pression atmosphérique due à la dépression Karlotta et enfin une houle importante venant du large, poussée par des vents de sud-ouest. Bien que le vent ne soit pas particulièrement fort sur la côte, les trois conditions évoquées plus haut ont provoqué une surcote importante de la mer, surcote proche de celle de Xynthia. Cette alerte venait après une première alerte de submersion le 2 novembre 2023, la dépression Domingos. Cette alerte, la première depuis deux ans, avait déjà décapé en partie les plages. Depuis plusieurs années, une résilience importante s'était établie. Le niveau de sable avait considérablement progressé.
Les photos suivantes ont pour objectif de montrer, non pas les dégâts puisque l'érosion à l'issue de ces événements tempêtueux est légèrement inférieure à l'érosion due à Xynthia, mais la puissance des éléments en quelques heures.
Le cordon dunaire de La Belle Henriette fut écrêté en plusieurs endroits par Karlotta (photo 1), provoquant une submersion de la lagune . L'élévation du niveau de l'eau dans celle-ci, provoqua une rupture du merlon de sable édifié après Xynthia (photo 2), pour protéger le camping des Rouillères et le lotissement de la "Porte des îles". Une semaine après, l'eau est restée en bordure du lotissement (photo3). N'oublions pas que 80 maisons de ce quartier avaient été inondées durant Xynthia (voir photos sur ce même site).
Ce phénomène de submersion est récurrent dans la lagune comme en témoigne l'historique de cette zone (voir article sur ce site). Janvier 1906, décembre 1911, mars 1928, novembre 1930, janvier 1940, février 1957, décembre 1999, décembre 2006, mars 2007, mars 2008, février 2009 : à chacune de ces tempêtes, la lagune fut submergée....
Voici deux photos prises durant la tempête Domingos. La première montre comment les vagues se brisent sur des enrochements, provoquant leur destructuration et entraînant des écoulements importants dans les propriétés riveraines. Ici c'est un parking, l'eau de mer s'était écoulée sur la route toute proche.
La deuxième photo, prise le même jour dans le même secteur, montre que les protections bois/paille sont dans certains cas et à certaines conditions de construction, pratiquement aussi efficaces.
Ces deux photos ont été prises le lendemain de Domingos. Sur la première, on voit que la mer est montée largement au-dessus des enrochements, décapant la plage. Les bois/paille ont protégé le cordon dunaire, particulièrement mince au Milouin. Cela n'est possible que parce que le platier (sous sol rocheux) est particulièrement haut ici. L'autre photo montre une conception différente de la structure, mais qui a joué son rôle de protection.
Curieusement la Karlotta a apporté énormément de sable comme en témoigne les photos ci-dessous prises le 16 02 2024
Ces photos montrent à quel point en quelques heures le profil de plage peut être modifié.
Toujours après Domingos, on remarquera que sur la première photo, ci-dessus, prise au début des Génerelles, les protections ont été vidées de leur "amortisseur", les bottes de paille compressées. La dune n'a que très peu été atteinte. Sur la seconde photo, prise à "La Pomme de pin", la paille est partie et les poteaux ont été chahutés. Ceci est dû vraisemblablement à une attaque plus forte de la mer, mais aussi, au fait que le platier est très loin de la base des pieux. Le sous-sol est composé d'une épaisse couche de sable posée sur des marnes. Pour solidifier l'ensemble, il serait, semble-t-il, nécessaire de poser des palplanches métalliques sur plusieurs mètres de profondeur pour éviter l'affouillement de la mer et donc la destruction des protections et du cordon dunaire.
Restons positifs, l'érosion marine se produit lors d'événements météorologiques exceptionnels, et entre ces événements, il y a souvent des effets de résilience comme le montrent ces photos prises sur la plage des Jards. Après Xynthia, la plage était complétement désensablée. Les photos prises, la première, le 15 mars 2022, la seconde le 22 novembre 2023, montrent une très forte résilience. La dernière photo prise le 12 février 2024 ressemble à la photo prise après Xynthia. Le trait de côte n'a pas évolué.
Plage Pomme de Pin 7mars 2022 forte résilience 7 novembre 23 12 février 24
Plage du Rocher, la première photo date du 7mars 2022. Sur la deuxième prise le 10 janvier 2023, on remarque un escalier métallique à la place de l'ancien accès, une série de protections "wave-bum" censées repousser la vague. Ces protections étaient placées en milieu de dune. La troisième photo prise le 12 février 2024 montre une micro-falaise. Les protections "wave-bum" posées trop haut n'ont pas joué leur rôle. La mer a largement affouillé dessous celles-ci ; on pourrait même penser que ce processus a agravé l'érosion, car c'est le seul point de notre littoral qui a reculé par rapport à Xynthia.
Plage des Génerelles La première photo a été prise en mars 2023. La plage, en pleine résilience, était particulièrement ensablée, comme en témoigne la photo de cet escalier. La seconde photo prise sur la même plage, sur le deuxième escalier, le 12 février 2024, montre un enrochement complétement dégagé. Le trait de côte bloqué par les murs n'a pas bougé, mais la plage n'a plus de sable.
En poursuivant la plage du Milouin en direction du phare, on trouve deux escaliers métalliques. Le premier se trouve maintenant détaché de la dune dans laquelle il était incrusté.
Proche de cet escalier au lieu dit "la Pointe de la République", la tourelle du blockhaus tombée sur le platier durant Xynthia est largement ensablée. Le corps du blockhaus se retrouve, lui, dégarni. Ce qui démontre un certain recul du trait de côte à cet endroit.
Photos prises le 16-02-2024. Ces blockhaus figurent sur tous nos relevés photographiques car ce sont des témoins de l'évolution du trait de côte.
Poursuivons notre chemin toujours en direction du phare ; la dune a été attaquée à divers endroits. Observons les photos ci-dessous prises le 16-02-2024.
L'observation de cette plage permet de voir une multitude de cailloux qui proviennent essentiellement du rocher de La pointe du Cou du Grouin. Des pieux plantés perpendiculairement à la dune permettent, lorsque ces derniers résistent, de ralentir le transit de ces cailloux. Leur amoncellement en pied de dune permet de la protéger. Lorsque ces pieux cèdent, trop peu denses ou trop loin de la dune, cette dernière est sérieusement attaquée comme en témoignent les photos ci-dessus. Pour que ce système fonctionne, il est indispensable que le platier soit très haut.
Ci-dessus, des photos prises à l'accès du Fond du Roy. Ce sont les plus hautes dunes de notre littoral tranchais. La côte est perpendiculaire à la plage précédente et les vagues viennent de face. L'érosion semble importante et pourtant, lorsque l'on compare avec Xynthia, le recul du trait de côte est légèrement inférieur, malgré la présence de falaises dunaires.
Les photos ci-dessus ont été prises le 17-02-2024 à La Terrière. Le cordon dunaire a été aussi érodé sur des kilomètres. Devant sa largeur et se trouvant éloigné des zones urbanisées, il est important de laisser la nature évoluer seule.
En conclusion, ces deux épisodes tempêtueux montrent :
- les dangers d'une urbanisation trop proche de l'estran ;
- que des solutions pour le ralentissement de l'érosion des dunes de sable à La Tranche, varient en fonction du platier et de l'orientation des plages.
Lorsque le cordon dunaire repose sur des couches de marnes, il est vraisemblablement préférable d'éviter l'affouillement, en posant des palplanches comme en témoignent les photos suivantes prises sur la digue de La Faute.
Parmi les dégâts, on peut compter la destruction d'une partie de la promenade de la plage centrale avec, en corollaire, un fort apport en sable.
La mer reste imprévisible dans ses attaques.